Les prix du foncier ont fortement augmenté en France ces dernières années. Une étude de l’INSEE en 2020 précise que les tarifs ont grimpé de 60 % depuis 2010. Cette hausse rend ainsi difficile l’accès à la propriété et même à la location pour une grande partie de la population.

La loi Lagleize souhaite aider les Français à acheter leur logement plus facilement dans de meilleures conditions et pour un moindre coût. Le gouvernement a présenté cette loi au Parlement à l’automne 2019. L’Assemblée nationale l’a adoptée en première lecture le 28 novembre 2019. Sans remettre totalement en cause le droit de propriété, elle instaure la séparation de la propriété du foncier de celle des murs.

En dépit des bénéfices générés pour réguler les problèmes d’investissement dans l’immobilier, la loi a donc suscité de nombreuses polémiques. La commission du Sénat a apporté des modifications importantes à ce texte. Découvrez tout ce que vous aimeriez savoir sur le contenu de la Loi Lagleize et sur son évolution.

Ce que le texte voté en première lecture prévoit

Limitation de la possibilité pour les entités publiques de vendre leur foncier aux enchères

La loi Lagleize souhaite limiter la vente par adjudications par les collectivités locales et par l’État de leurs terrains situés dans les zones tendues. Cela évite ainsi que les entités publiques participent à l’augmentation du prix du foncier dans ces espaces où le prix du terrain dépasse le prix des logements. Selon le rapport Lagleize, 30 % des communes vendent leurs terres aux enchères.

Création des Organismes fonciers libres et du Bail réel libre

Le texte prévoit également la création par ordonnance des Organismes fonciers libres (OFL) et du Bail réel libre (BRL). Ces entités publiques devront acheter et gérer le foncier dans les zones identifiées comme tendues. Ces organismes à vocation publique doivent identifier, acquérir et construire des appartements pour les revendre aux foyers issus de la classe moyenne. Ils permettent en effet l’accession à la propriété sans condition de ressources. Ceci fait toute la différence avec les organismes fonciers sociaux (OFS) créés en 2014. Ces derniers offraient jusqu’alors la possibilité aux foyers les plus modestes d’acquérir leur logement grâce à un bail réel solidaire. Dans le cas des baux réels libres, l’OFL passe un contrat sans condition de ressources avec l’acquéreur du logement. Le propriétaire du logement paie en quelque sorte un bail au propriétaire du foncier.

Établissement d’un Fond de Dépollution des Friches géré par l’Association Action Logement

L’article 4 de la loi prévoit la création d’un Fonds de Dépollution des Friches géré par l’Association Action Logement. Il recense les terrains vagues, finance leur dépollution. Ensuite, ils construisent des logements sociaux, de bureaux, d’espaces commerciaux, de services et de loisirs.

 

Observatoires de l’Habitat et du Foncier

L’article 3 met en œuvre les observatoires de l’Habitat et du Foncier. Ils apportent des informations fiables et vérifiées sur le marché du logement.

  • Ils analysent l’état du marché foncier et immobilier, recensent les aires en friche et repèrent les espaces disponibles pour construire des immeubles.
  • Ils publient également des données relatives à la situation locale de l’immobilier social.
  • Ils apportent aussi de la transparence sur le marché du logement et offrent un outil aux collectivités locales pour leur politique d’urbanisme.

Le décret du 13 octobre 2022 a entériné leur création. Ils sont obligatoires pour les EPCI dotés d’un Plan local d’Habitat. En plus de leurs missions prévues dans le texte de loi Lagleize, ils veillent à limiter l’artificialisation des sols. La transformation d’une terre agricole ou d’une forêt en terrain destiné à la construction de logements ou de zones artisanales, commerciales ou industrielles devient de ce fait, plus complexe à mettre en œuvre.

Ils analysent en outre l’offre foncière disponible. Ils identifient ainsi les friches constructibles et les locaux vacants. Les agences d’urbanisme et les établissements publics fonciers guident les observatoires de l’Habitat et du Foncier. Ces organismes publics réfléchissent aux politiques urbaines et constituent des réserves foncières pour réaliser des projets d’aménagement publics.

Délégation de compétence des communes aux EPCI pour la mise en œuvre du Plan local de l’Habitat

L’article 7 charge les collectivités de délibérer une fois par an sur la mise en œuvre du Plan local de l’Habitat (PLH) à partir des informations communiquées par l’observatoire foncier.

Les changements apportées par la commission du Sénat

Révision des relations entre le service des domaines et les collectivités territoriales

La Commission du Sénat a rejeté l’interdiction faite aux collectivités locales de recourir à la vente par adjudication par le biais du service des domaines. Cette suppression permet aux collectivités territoriales de bénéficier d’un plus grand pouvoir de décision sur l’utilisation et l’affectation des biens fonciers qu’ils possèdent. Les collectivités territoriales peuvent ainsi mettre en place des politiques de logement et de développement économique plus adaptées à leur situation locale.

 

Extension des compétences des Organismes fonciers libres

La Commission du Sénat considère que le Parlement ne peut se dessaisir d’un sujet aussi essentiel que le droit à la propriété sans étude ni avis du Conseil d’État. Elle estime également que cette mesure serait peu efficace pour limiter le prix du foncier, à la vue des expériences déjà menées à Lyon, Londres ou Amsterdam. La commission du Sénat a également souligné que la loi ne définit pas suffisamment les compétences, la gouvernance et le mode de financement des OFL et BRL. Cela peut, au contraire, complexifier la situation.

La Commission du Sénat a donc voté des amendements pour préserver les organismes fonciers sociaux. Les OFS peuvent désormais vendre leurs logements sous forme de BRS et étendre leur compétence aux locaux commerciaux et professionnels. Elle relève par ailleurs le plafond des ressources des ménages pour l’accès au bail réel solidaire de façon à faciliter son accès des classes moyennes.

La commission souhaite de même favoriser la réhabilitation des centres-bourgs.

Le Fond de Dépollution des Friches industrielles

La Commission a estimé qu’Action Logement ne possède pas la compétence et le savoir-faire nécessaires en matière de dépollution. La création d’un fonds doit, par ailleurs, respecter le principe du « pollueur-payeur » et éviter ainsi de se priver de fonds européens.

Soutien et Développement des Outils existants

La Commission du Sénat a montré sa volonté de soutenir et développer les outils existants, notamment les OFS. Elle se montre soucieuse de respecter la libre administration des collectivités locales et des prérogatives parlementaires. Elle a également voté des amendements pour élever le plafond des ressources et donner la possibilité à davantage de foyers des classes moyennes d’accéder à la propriété.

Les OFS ont obtenu la possibilité d’étendre leur compétence aux locaux commerciaux et professionnels situés au bas des immeubles d’habitation. La commission autorise en outre les OFS à vendre une partie de leurs logements sous forme de BRS aux foyers à la recherche d’un logement à acquérir.

La Loi Lagleize, votée en première lecture à l’Assemblée nationale le 28 novembre 2019, souhaite résoudre les difficultés rencontrées en matière d’acquisition immobilière dans les zones tendues. Les modifications apportées par la Commission du Sénat concernent la possibilité laissée aux collectivités territoriales et à l’État de recourir aux enchères pour vendre leur foncier, le renforcement des compétences des OFS, et le Fond de Dépollution des Friches.

Le droit de propriété classique existe toujours et cette loi ne concerne que les achats à l’intérieur des immeubles et résidences et non les maisons individuelles.